Le vendredi 23 novembre 2012 [13h00] (www.unita-naziunale.org) : La multiplication dramatique des assassinats dessine un sombre tableau de l’état actuel de la société corse. Ces évènements dramatiques inquiètent profondément tous les Corses, qui s’interrogent sur les raisons de ces dérives et sur ce qu’elles révèlent de l’état actuel de notre pays. Et qui s’inquiètent, également, du modèle de société dans lequel les jeunes grandissent et dans lequel ils auront, demain, à vivre leur vie d’adulte.
Plus que jamais, il est donc de la responsabilité des forces vives de ce pays de dégager des lignes de force, de tracer des perspectives, et de proposer un chemin qui soit celui de la vie, de l’espoir et de la construction d’une société profondément démocratique.
FEMU A CORSICA s’inscrit résolument dans cette perspective.
Nous avons choisi d’attendre avant de prendre publiquement position au plan politique par rapport aux derniers évènements dramatiques, et aux réactions de l’Etat que ces évènements ont suscité.
D’abord pour respecter le temps du deuil des familles meurtries.
Ensuite pour avoir le recul nécessaire par rapport aux annonces faites par l’Etat et aux orientations politiques que celui-ci semble envisager, ceci au delà des déclarations faites par les uns ou les autres dans le temps de la réaction médiatique.
La présente conférence de presse de FEMU A CORSICA a donc pour objectif principal d’interpeller solennellement l’Etat sur les choix qu’il s’apprête à faire en matière d’une part de police et de justice, d’autre part de politique.
Nous le faisons aujourd’hui, et à la veille du déplacement en Corse de Mr VALLS et de Mme TAUBIRA.
En effet, les modalités d’organisation de cette nouvelle visite, et notamment le temps dérisoire imparti aux échanges avec les élus de la CTC, laissent craindre que ne puisse s’instaure un véritable dialogue, autour des véritables enjeux.
I – A propos de la réponse policière et judiciaire aux assassinat et aux dérives
La police et la justice sont à ce jour des compétences régaliennes.
L’Etat doit les exercer de façon normale, dans le respect de l’Etat de droit et des libertés individuelles.
A – Les Corses ont de la mémoire : on ne nous refera pas le coup de la période BONNET
La politique mise en place par Bernard BONNET n’était pas le fruit de la dérive solitaire d’un haut fonctionnaire.
Elle avait été voulue et organisée au plus haut sommet de l’Etat : la culpabilisation collective de toute une communauté, les procédures d’exception et leur cortège de violation des droits fondamentaux : atteintes à la présomption d’innocence, incarcérations abusives, racisme et tracasseries anti-corse au quotidien et, pour couronner le tout, dérives barbouzardes du GPS sous l’autorité d’un Préfet…
B – De plus, l’Etat, s’il veut être crédible dans l’affirmation de sa volonté de lutter contre les dérives, doit assumer sa part de responsabilité, majeure, dans la situation actuelle
Cette part de responsabilité est majeure :
1°)Dans le temps long : L’Etat est le premier comptable et le premier responsable de la politique menée dans ce pays pendant deux siècles et de ses fruits amers : sous-développement économique, destruction culturelle, absence de démocratie politique réelle.
2°) Dans le temps court :
1) c’est un fait objectif, et une vérité reconnue par tous les observateurs : depuis trente ans, l’Etat a concentré la totalité de sa politique répressive contre le nationalisme, et a laissé prospéré, lorsqu’il ne l’a pas encouragée et soutenue, la grande délinquance organisée.
2) L’Etat a également cautionné, voire organisé, des pratiques et des politiques contraires à l’Etat de droit : hier les barbouzes de Francia, aujourd’hui les manipulations douteuses de certains services de police et officines parallèles…
3) L’Etat a également choisi, pendant toute la période contemporaine, de ne jamais porter le fer contre les mécanismes structurants qui sapent le fonctionnement démocratique de la vie économique et politique : spéculation immobilière, fraudes et détournement d’argent public (notamment les marchés publics), fraude électorale…
Ce sont ces mécaniques sur lesquelles le Ministre de l’intérieur et l’Etat et les représentants de l’Etat devraient s’exprimer publiquement, et non pas prendre des positions si caricaturales qu’elles en deviennent dérisoires comme par exemple :
– « Les Corses savent mais ne parlent pas » : A qui fera-t-on croire que si les enquêtes ne sortent pas, c’est parce que les témoins font défaut ? A qui fera-t-on croire que le citoyen lambda saurait des choses que les policiers, les gendarmes, les juges ne savent pas, ceci alors même que la Corse est le territoire de France et d’Europe où il y a le plus de services de police, de Gendarmerie, et de renseignement en activité ?
– « Les notaires corses sont muets » : A qui fera-t-on croire que le corps des notaires est, en Corse, un allié objectif de la Mafia ? Et après les notaires, à qui le tour : les avocats, les patrons de PME, les chômeurs… ?
– « L’Etat agit pour défendre le littoral en démolissant les constructions sans permis » : pour une destruction-alibi médiatisée, combien de permis illégaux délivrés, de PLU entérinés, d’espaces agricoles livrés à la spéculation, de programmes immobiliers spéculatifs validés ?
II – La réponse politique aux attentes et aux espoirs du Peuple corse
La question corse est une question fondamentalement politique : elle est celle d’un peuple qui se bat pour la reconnaissance de ses droits, et qui veut construire une société moderne, ouverte, solidaire et démocratique.
Dès mars 2012, soit avant l’élection présidentielle, FEMU A CORSICA avait interpellé tous les candidats à l’élection pour leur demander de faire connaître leur vision de la question corse.
Aucun ou presque n’a répondu, en tous les cas aucun des deux principaux candidats.
Le même silence a prévalu au lendemain de l’élection présidentielle et des élections législatives.
Les seuls propos publics prononcés par le Président de la République et le Gouvernement concernant la Corse l’ont été au lendemain de la série d’assassinats qui a frappé l’île.
Ces propos tendent à laisser penser que, pour l’Etat, le problème se limite à une réponse policière et judiciaire à la situation actuelle.
Cette approche, qui alterne mutisme prolongé et effets d’annonce médiatique, ne peut tenir lieu de politique.
De même, arguer d’une situation de crise liée au grand banditisme pour refuser de prendre en compte l’aspiration largement partagée à une évolution politique et institutionnelle ne peut conduire qu’à l’impasse.
Sur le court, le moyen et le long terme, la réponse la plus forte et la plus efficace aux maux qui minent la Corse est la construction d’une société émancipée, forte de son identité et porteuse d’un projet collectif.
Les résultats électoraux réalisés par FEMU A CORSICA et au delà, par l’ensemble des nationalistes, le fait que les idées hier défendues par les seuls nationalistes soient aujourd’hui largement partagées par un grand nombre de Corses démontrent que le statu quo n’est pas tenable.
La question est donc claire : l’Etat accepte-t-il de s’engager dans la recherche d’une solution politique globale, qui passe notamment par une réforme constitutionnelle donnant à la Corse et à son peuple les moyens de se développer et de s’épanouir ?
Corsica Infurmazione, L’information Corse
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