Le jeudi 14 juin 2012 [12h00] (www.unita-naziunale.org) : Les présidentielles ne devraient pas être le scrutin de prédilection des nationalistes corses, mais certains (au-delà des appels nationalistes en faveur des candidats anti-système (LCR, Europe-écologie) que d’aucuns jugent, à tord ou à raison «marginaux », votent néanmoins. Il faut cependant noter qu’en dépit d’un plus grand nombre d’inscriptions, l’abstention, les votes blancs ou nuls ont augmenté par rapport à 2007.
Les candidats du Front de Gauche (quasiment anti-corse) et du Parti socialiste n’ont guère brillé dans leurs propositions pour la Corse. Quarante années de luttes et de sacrifices pour se voir proposer la signature de la charte des langues minoritaires est pour le moins insignifaint. Qu’il est loin le temps des propositions d’un François Mitterand ou d’un Lionel Jospin, où la question corse, à défaut d’être résolue, était au moins reconnue.
La droite, la Corse et les nationalistes, la subissent depuis des années avec le répression et les manipulations policières et judiciaires en tout genre..la société corse n’aura jamais été aussi mal en point que depuis que son règne a commencé à Paris ( d’ailleurs son candidat a perdu 5000 voix par rapport à 2007).
Le fait nouveau aujourd’hui semble pour certains médias la montée du FN, que d’aucuns d’ente-eux, avec la gauche jacobine et « républicaine » bien pensante, mettent sur le compte du soutien des nationalistes corses.
Nous devons remémorer un certain nombre de paramètres que l’on tend sciemment à occulter.
– Le nationalisme corse n’a rien à voir avec le nationalisme d’un parti nationaliste partie prenante d’un état souverain constitué avec son armée, sa police, ses institutions, sa langue, sa culture reconnue.. Il ne faut pas confondre le nationalisme du dominant (colonisateur) avec le nationaliste du dominé (colonisé) qui défend son identité, sa langue, sa culture et ses drtoits sur sa terre.Il y a antinomie.
– De tous temps, il y a eu un vote d’extrème-doite en Corse, dans une île traditionnellement de droite (gaullisme, société conservatrice rurale, goût pour certaines valeurs d’ordre et de morale propres à notre société traditionnelle corse..). Dans l’environnement socio-économique, la classe ouvrière était bien moindre que d’autres couches sociales (agriculteurs, petits commerçants et artisans, pêcheurs, professions libérales, ou salariés en tout genre) plutôt conservatrices. De plus nombre de Corses ont servi dans les forces armées, policières ou judiciaires peu propices en général aux «idées de gauche» ou trop « progressistes ».
– Ce qui change aujourd’hui, c’est effectivement un fort score du FN. Il suffit pourtant de voir que ce score engrange des votes de tous horizons (Alata, maire de gauche, le FN arrive en tête à l’instar d’autres communes traditionellemnt classées à gauche, Sarrola-Carcopino, ou même Cuttuli-Corticchiato jusqu’à peu…).
Les Corses qui ont voté FN se trompent et ils ont eu tord de le faire. Les nationalistes (électeurs) qui ont voté FN eux aussi se trompent et se trompent d’ennemi. Le Corps electoral en Corse a évolué depuis une dizaine d’années et la décorsisation s’est accentuée, surtout dans les villes (aujourd’hui elles représentent 70% de l’électorat, contrairment à peu où le rural représentait 70% des électeurs). Depuis l’an 2000, chaque année, 4000 nouveaux arrivants, très majoritairement non corses, s’inscrivent sur nos listes électorales. Jusqu’à peu, s’astreignant à une certaine réserve, ils ne se privent plus aujourd’hui du droit de parler de la Corse et des Corses, y compris de décider de l’avenir d’une île dont ils ne connaissent pas grand-chose en dehors de la carte postale qui les a attirés chez nous. Ils ne se privent plus d’avoir leur mot à dire, « leur solution », à toutes sortes de problèmes qu’ils rencontrent dans l’ïle.
Il suffit de se pencher aujourd’hui sur la « société en Corse» pour voir que le pouvoir économique, social, sportif et culturel échappe d’ores et déjà de plus en plus aux Corses (Il n’y a qu’à voir le nombre croissant de nouveaux corses, arrivés pour certains depuis très peu dans l’île, ayant de plus en plus droit de cité dans les médias donnant leur avis et leur analyse sur des problèmes en Corse, comme s’il parlaient de l’Ardèche ou de la Lozère, sans rien connaître ou vouloir connaître de la spécificité corse, participant de facto à donner de notre peuple l’image d’une «population locale », assimilant notre île à n’importe quelle région française..)
Ce ne sont pas les problèmes de «vivre ensemble» qui existent dans certains quartiers d’Ajaccio ou Bastia ou ailleurs, (qu’il faut cesser de camoufler) faisant craindre à certains un lent glissement vers des situations de banlieues françaises, qui sont les responsables de la situation faite à la Corse (insécurité, drogue, chômage, exclusion ,manque de logement et d’emplois..).
Beaucoup de ces problèmes de «vivre ensemble » pourraient être mieux gérés par exemple si les municipalites ou les autorités implantaient de façon permanente, y compris la nuit, une veritable police corse de proximité dans certains quartiers (au lieu de passer leur temps à mettre des PV de stationnement comme à Ajaccio) en liaison avec les services sociaux (logement, soutien moral, écoute des doléances des habitants, connaissance des problèmes, soins..).
Mais il faut aussi que la Corse revendique un droit à la maîtrise de ses flux migratoires et que le problème d’un trop grand nombre d’immigrés par rapport au nombre de Corses rendant quasi-impossible toute politique d’intégration sur son sol (la Corse a cessé de fabriquer naturellement des Corses) puisse être analysé sereinement, sans aucune forme de racisme ou de xénophobie (les immigré sne sont pas que magrébins, ils sont aussi d’Europe du Nord ou de l’Est, et les «Français» sont eux aussi des immigrés de l’intérieur).
– Si l’on analyse les zones du vote FN, notamment à Porti-Vecchjo, Calvi-Balgne, La Côte des nacres, Propriano, le Grand Ajaccio, « là où on ne connait plus personne » et « où les maisons et propriétés sont entourées de barrières » (les banlieux chics) on constate vite qu’au delà des membres des forces de l’ordre policières et militaires françaises (et des retraités de ces forces de plus en plus nombreux à s’installer à leur retraite dans l’île) ce vote FN provient majoritairement des «nouveaux Corses», dont beaucoup assez aisés, installés depuis ces dernières années dans l’île pour y trouver le paradis et s’appercevant aujourd’hui que les problèmes de la société française auxquels ils ont cru pouvoir échapper arrivent chez nous (insécurité, drogue, violences et autres avec en plus entre-autres le coût de la vie, les atteintes à l’environnement, la multiplication des constructions, les problèmes d’emplois de logement, des terrains…) troublant leur quiétude, sur fond de crise mondiale s’aggravant et de peurs des lendemains. Ne faisant pas ou plus confiance à la droite en place (qui depuis longtemps au pouvoir n’a rien résolu de ce qu’ils jugent fondamental pour de « bons Français ») ils choisissent donc l’extrème-droite pour défendre leur esprit franchouillard. Ce glissement de la droite vers l’extrème droite de la part de ceux qui ont la « mentalité du petit blanc » des colonnies s’est produit ailleurs dans d‘autres colonies. Il est en fait la concrétisation progressive d’un «communautarisme français » qui peu à peu tend à s’organiser en Corse. Ayant déjà pignon sur rue au plan économique, social, culturel, on peut se demander quand ces nouveaux corses voudront aussi avoir un certain pouvoir politique.
– A côté de ses gens aisés qu’ils rejoignent eux dans un vote de protestation d’extrème-droite, on trouve aussi (la misére se vit mieux au soleil) on trouve aussi beaucoup de chômeurs ou d’exlus du «quart-monde français» arrivant chez nous pour enfler les listes du pôle emploi, les services sociaux, occupant les stages de formation et les petits boulots l’été, très remontés contre les pouvoirs publics et les institutions françaises actuelles qu’ils accusent de les abandonner au profit d’autres populations défavorisées «non françaises»
– Le mouvement nationaliste corse doit se pencher sur cette situation en faisant comprendre aux Corses qu’ils se trompent en votant FN et aux nationalsites qu’iles sont dans l’erreur la plus absolue en votant comme beaucoup de ceux que les nationalistes dénoncent au titre de la colonisation de peuplement. Ils doivent plus que jamais réaffirmer que la communauté de droit en Corse est le peuple corse et que s’intégrer à ce peuple implique des devois et pas seulement profiter du cadre ce vie et de certains avantages de « nantis », en votant pour des idées aux antipodes des valeurs et aspirations des Corses car refusant la réalité d’une spécificité corse et des droits du peuple corse sur sa terre. Ils doivent aussi remetre en avant la nécessité d’une solution politique en Corse reposant sur le droit des Corses sur leur terre, et non pas de quelques mesurettes économiques ou culturelles ne prenant pas en compte la dimension politique de la situation corse.
Pierre Poggioli, Corsica Libera
U Ribombu / Juin 2012
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