Le conflit sur les droits de scolarité au Québec a pris vendredi une tournure juridique avec le dépôt par les étudiants de deux recours en justice contre la loi spéciale adoptée le 18 mai et qui limite selon eux la liberté d’expression et d’association.
“C’est la plus grande affaire constitutionnelle au Québec à cause du nombre de gens concernés”, a déclaré l’un des leaders étudiants, Léo Bureau-Blouin, devant le palais de justice de Montréal, affirmant que 1,5 million de Québécois étaient directement touchés.
Quelque 140 personnes issues de 25 organisations estudiantines, environnementales et syndicales, ainsi que des groupes communautaires et des associations d’artistes ont présenté ces requêtes devant la Cour supérieure du Québec.
“Cette loi ignoble a pour effet de museler, d’écraser, de contrôler et de dominer le mouvement étudiant et d’autres groupes qui souhaitent s’exprimer publiquement”, ont-elles précisé dans une déclaration commune.
La première requête déposée vise à bloquer l’application de la loi par la police et pourrait être examinée mercredi, la seconde est une requête en nullité, dont l’examen est attendu début juin, ont précisé les dirigeants étudiants.
Par la suite –mais cela devrait prendre beaucoup plus longtemps– certains aspects de la loi pourraient aboutir à la Cour suprême qui devrait se prononcer sur leur constitutionnalité, contestée par ses adversaires.
Le gouvernement du Québec n’a pas été surpris par cette démarche.
“C’est intéressant que ça vienne entre autres d’une association qui se +fout+ des décisions des tribunaux”, a ironisé le ministre des Finances de la province, Raymond Bachand, dans une allusion à l’organisation étudiante la plus radicale, la Classe.
Le ministre québécois de la Sécurité publique, Robert Dutil, avait lui-même admis cette semaine que “plus tôt un juge se prononcera (sur la constitutionnalité de la loi, ndlr), mieux ce sera”.
Aux yeux du gouvernement de centre-droit de Jean Charest, la loi en question est destinée à encadrer la liberté de manifester pour garantir l’accès aux établissements universitaires des étudiants non-grévistes, souvent bloqués par des piquets de grève.
Elle impose aussi aux manifestants de communiquer à la police leur itinéraire huit heures à l’avance, prévoit des amendes très élevées pour les contrevenants et vise à mettre un terme au conflit étudiant qui dure depuis plus de 100 jours.
Depuis son adoption, plus de 1.000 personnes ont été arrêtées au Québec, mais assez paradoxalement, aucune de ces interpellations n’a été faite en vertu de cette loi mais plutôt en application de règlements municipaux.
Seules quatre arrestations ont eu lieu à Montréal dans la nuit de jeudi à vendredi, a déclaré vendredi à l’AFP un porte-parole de la police de Montréal.
Par milliers, les Montréalais sont pourtant descendus à nouveau dans la rue pour taper joyeusement sur toutes sortes de récipients en signe de protestation contre la loi spéciale, dans une ambiance festive.
“Les casseroles déferlent”, titrait vendredi le quotidien Le Devoir, “Le tintamarre s’amplifie”, renchérissait La Presse après cette nuit de contestation bruyante.
Le mouvement des casseroles, lancé par un enseignant il y a une semaine sur Facebook, s’est aussi propagé dans plusieurs villes de la province.
Le gouvernement du Québec a convié les étudiants à une “rencontre” la semaine prochaine, dans ce qui est perçue comme une réunion de la dernière chance pour tenter de sortir de la crise avant le prochain Grand Prix de F1 du Canada et les grands festivals qui rythment l’été à Montréal.
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