Il y a vingt ans, Jean Fernandez était au cœur du drame de Furiani. A l’époque, il était entraîneur-adjoint de l’OM de Bernard Tapie et Raymond Gœthals.
Photo AFP
GÉRARD PONCIE, COORDONNATEUR DU LIVRE « Furiani 20 ans » et auteur de la préface d’un poignant recueil de témoignages, termine par une phrase lourde de symboles : « Nous avons ouvert ce livre sur le souvenir, ne le refermons pas sur l’oubli ».
Vingt ans. C’était le 5 mai 1992. Devant les caméras du 20 heures de TF1, la tribune Nord du stade Armand-Cesari, érigée en urgence, au mépris des règles de sécurité les plus élémentaires pour faire de l’argent, s’écroulait comme un château de cartes, sous le poids de milliers de spectateurs fanatisés. La demi-finale de la Coupe de France Bastia — Marseille basculait dans l’horreur.
Dans un amas de ferraille, on extirpa les corps et les blessés. La pelouse du stade se transforma en hôpital de guerre à ciel ouvert sous le vacarme terrifiant du va-et-vient des hélicoptères. Le bilan est terrible : 18 victimes, 2.357 blessés : « Je venais de terminer l’échauffement.
Je rentrais dans le tunnel lorsque j’ai entendu une énorme explosion. Je n’ai pas songé sur l’instant, à cette tribune dont la hauteur, m’avait fait peur en arrivant au stade. Je pensais plutôt à un attentat. J’ai fait demi-tour. Lorsque je suis ressorti, que j’ai vu ce paysage apocalyptique, j’ai vraiment cru qu’il y avait des… centaines de morts », raconte, les yeux embués d’émotion, Jean Fernandez, à l’époque entraîneur-adjoint de l’OM de Bernard Tapie et Raymond Gœthals, aujourd’hui entraîneur de l’AS Nancy-Lorraine. « On a aidé à porter les gens. J’ai donné ma parka à un journaliste de Marseille qui sombrait dans le coma. D’autres, blessés et allongés sur la pelouse, me suppliaient de téléphoner à leur femme ».
Gérard Poncié et ses collègues qui ont participé à cet ouvrage n’ont pas souhaité relancer la polémique, ouvrir une nouvelle enquête même si on n’a, jamais retrouvé, par exemple, trace de la recette des entrées au stade. Le procès a eu lieu le 4 janvier 1995. L’ingénieur de Sud Tribunes, chargé du montage a été condamné à deux ans d’emprisonnement, mais le préfet de Corse Henri Hurand ou le président de la Fédération française de football Jean Fournet-Fayard s’en sont sorti blanc comme neige.
« On a préféré écouter les familles parler avec leur cœur. Ils ont perdu parents, époux, enfants, frères et sœurs. Durement touché, le monde de la presse sportive française, a aussi laissé parler sa plume. On voulait pour une fois que les journalistes témoignent à la première personne », ajoute Gérard Poncié.
Perchés au dernier rang de la tribune pour couvrir l’événement, ils n’ont évidemment jamais oublié. Frères d’armes et de larmes, ils parlent de cette tribune comme un meccano du diable, chérissent leur bonne étoile, maudissent la folie des hommes, rendent hommage à l’élan de solidarité des Corses.
Hasard du calendrier, la 36 e journée de Ligue 1, devait avoir lieu un 5 mai. Depuis, la date a été rayée, pour ne rien oublier : « Je garde en mémoire l’arrivée avec l’équipe, à Marignane à 5 heures du matin le 6 mai 1992. Ce n’était plus un aéroport mais un hôpital », ajoute Jean Fernandez.
Lundi dernier, le coach de l’ASNL était à Furiani, buste droit, gorge serré devant la stèle, posée à l’entrée du stade en hommage aux 18 victimes : « Si seulement, ils avaient écouté Tapie. Il a tout essayé pour que le match se déroule à Marseille ».
INFO EXPRESS
19 avril : lancement de « Furiani 20 ans » à la bibliothèque départementale des Bouches-du-Rhône. 224 pages pour 15 €. Les bénéfices serviront à l’achat de lits médicalisés pour des hôpitaux de Marseille et Bastia.
Contacts : Gérard Poncié, président de l’Union des Journalistes de Sport en France, section Provence : 06.88.09.10.09 ou livrefuriani@
hotmail.fr ou http ://www.face book.com/#!/ Furiani20.
« 20 ans déjà et pour beaucoup d’entre nous c’était hier »
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