Quiconque lit mes articles a le droit de ne pas les aimer, de les exécrer même voire tout simplement de ne pas les consulter. Pour avoir mis en cause de manière injuste un responsable syndical paysan me voici soudain taxé d’auxiliaire de l’état en matière de répression.
Chroniqueur et non journaliste
Je l’ai déjà écrit maintes et maintes fois : je ne suis pas un journaliste mais un chroniqueur. Mes papiers, qui n’engagent que moi, traduisent le regard que je jette sur cette Corse où je vis avec ma famille. Un point c’est tout. Ma plume serait parfois injuste ? Vraisemblablement. Elle l’a indubitablement été pour ce qui concerne ce responsable syndical paysan que j’ai mis en cause en reprenant avec légèreté le contenu d’un article paru dans un hebdomadaire continental. J’ai eu doublement tort. D’abord parce que l’article avait pour source une prétendue fuite de la justice antiterroriste, justice qui à mes yeux représente un outil liberticide. Ensuite, parce qu’une telle fuite pourrait bien avoir été une manipulation destinée à discréditer un militant sans tâche. J’ai donc choisi un bien mauvais exemple pour étayer une démonstration que je crois être juste : l’ambiguïté fondamentale des Corses face à la puissance étatique. J’ai donc eu tort sur ce point précis (seulement sur ce point) et j’en suis désolé pour ce militant. Était-ce une raison pour m’appliquer un traitement qui s’est voulu à l’identique, usant d’un morceau d’une interview (reconstituée par le journaliste car synthétisant une heure de discussion) pour m’accuser d’avoir participé à la répression de l’après Erignac alors même que cette interview dénonçait justement la répression qui s’abattait sur des centaines de nos compatriotes. Est-ce honnête et courageux que de ne pas signer de telles affirmations et surtout de ne pas préciser que l’interview intitulée “Comment on criminalise le peuple corse” avait été donnée alors même que je sortais d’une garde à vue voulue par le juge Bruguière et exécutée par la police antiterroriste ? Est-il normal lorsqu’on est en désaccord avec une personne d’aussitôt tenter de la salir ? Et en admettant que j’ai commis une erreur, est-il juste de répondre à l’injustice d’un propos par une autre injustice ?
Agent secret, consigliere du grand banditisme, auxiliaire de police, militant du FLNC
Au cours de mon long parcours corse (40 ans déjà) j’aurais été tour à tour traité de “caution intellectuelle du FLNC”, de militant clandestin, de terroriste, d’agent secret, d’auxiliaire de police, d’intellectuel du grand banditisme, de naïf et j’en passe. C’est beaucoup pour un seul homme et c’est surtout complètement idiot. J’ai en effet rencontré à sa demande une conseillère de Lionel Jospin afin de donner mon sentiment sur la situation dans l’île. Le préfet Bonnet pataugeait en Corse, la DNAT s’embourbait dans son enquête et j’avais alors la réputation de connaître la Corse, réputation ô combien fallacieuse. J’ai rencontré cette conseillère à deux reprises, la première pour lui affirmer que je croyais dur comme fer à la piste mafieuse pour ce qui concernait l’assassinat du préfet et que je considérais le communiqué de revendication comme un faux grossier, la deuxième pour m’affronter à elle toujours sur la question de la répression. Là s’arrête ma “collaboration” avec Matignon alors même que quelques années plus tôt celle des responsables nationalistes avec le ministère de l’Intérieur avait autrement plus fructueuse. Deux mois plus tard, mon cousin et ami Don Trajan Culioli était arrêté par le juge Thiel pour un attentat. J’envoyais à Clotilde Valter une longue lettre dans laquelle j’exprimais tout le mal que je pensais de la répression en Corse et tout le mépris que j’avais pour elle et je me consacrais entièrement à la libération de Donu. J’ai écrit tout cela dans un livre intitulé “Pour Don Trajan”.
Arrêté par la Dnat
En décembre 1998, la DNAT m’avait donc arrêté dans le cadre de la piste intellectuelle explorée par le juge Bruguières. J’avais rencontré durant ma garde à vue outre les commissaires Lelièvre et Marion, l’inspecteur qui avait été tout spécialement chargé d’analyser mes écrits afin d’y retrouver une concomitance avec le texte de revendication de l’assassinat du préfet Erignac. Une fois relâché, j’avais contacté Franck Johannès, journaliste à Libération qui m’avait interviewé par téléphone n’était donc qu’un résumé de notre longue conversation. Je déclarais (si mes souvenirs sont exacts) m’être livré à des analyses sémantiques pour des journaux et pour Matignon ce qui représentait un raccourci saisissant entre ce que j’avais raconté à propos de mes relations éphémères avec une conseillère du premier ministre et ce que m’avait indiqué l’inspecteur de la DNAT. Ainsi se sont achevées mes aventures matignonesques. Alors c’est vrai que j’aurais dû demander un rectificatif. J’ai laissé filer heureux d’avoir pu m’exprimer. Qui ne s’est jamais senti trahi par des propos mal rapportés ou excessivement contractés dans un article ? Mais le plumitif anonyme qui m’accable aurait pu se donner la peine d’aller un peu plus avant et il aurait découvert ma tribune libre parue dans le Monde du 18 décembre 1998 en première page sous le titre “Comment la France criminalise les Corses” dans laquelle, pour démontrer l’absurdité de cette répression qui s’élargissait de semaine en semaine, je racontais l’épisode sémantique. J’écrivais alors : « Être corse devient un facteur aggravant en tous domaines y compris intellectuels. J’ai pu rencontrer le policier de la DNAT qui travaille sur certains de mes ouvrages afin, ai-je compris d’établir un éventuel lien entre le style des communiqués revendiquant l’assassinat du préfet et mon style propre… » Il aurait aussi pu se demander en toute logique pourquoi “un auxiliaire de l’état” était arrêté à l’heure du laitier par les représentants de l’état qu’il était censé servir et pourquoi il aurait “avoué” à un journal ses “turpitudes collaborationnistes” ?
Non rien de rien je ne regrette rien
Que dire de plus sinon que je me suis totalement impliqué dans la lutte contre la répression après l’assassinat du préfet allant jusqu’à donner tout seul à Ajaccio une conférence de presse pour la libération de Marcel Lorenzoni sur les conseils de mon ami Paul Antonietti, alors attaché au cabinet de José Rossi et ami de Jean Guy Talamoni, conférence reprise par Libération et par le Monde en l’absence (allez savoir pourquoi) de tout représentant des organisations nationalistes. Marcel Lorenzoni, libéré quinze jours plus tard, a d’ailleurs tenu à m’en remercier personnellement. Sacré auxiliaire de l’état français tout de même non ? J’ai également participé à toutes les mobilisations qui ont suivi l’arrestation des membres du commando Erignac rencontrant en 2000 la famille Colonna pour l’assurer de mon affection. J’ai été maintes et maintes fois sollicité par certains lecteurs du Ribombu que j’ai aidés grâce à mes connaissances parisiennes. Je tiens à la disposition du Ribombu les noms, les circonstances et les dates. Plus d’un serait surpris.
Un pitoyable échange
Quelle leçon tirer de ce pitoyable échange ? J’ai certainement eu tort d’utiliser les données d’un article sans les vérifier mais surtout sans mesurer les possibles conséquences de mon écrit. Néanmoins je ne donnais aucun nom. Mais surtout j’ignore tout ce responsable syndical et j’aurais évidemment évité d’écrire sur lui si j’avais pensé une seconde que cela risquait de remuer la boue. À rebours, l’article du Ribombu n’est pas signé et il insinue. Il joue la rumeur et à partir d’un détail absurde tente de rendre un sentiment global sur ma personne. C’est un procédé utilisé dans certaines dictatures et c’est dégueulasse. Je n’ai jamais entretenu de relations avec la place Beauvau fussent-ils politiques. Je vais donc continuer à m’exprimer à ma façon en tâchant bien entendu d’éviter les maladresses mais en combattant cette dérive que sont les justices d’exception, la violence sous quelque forme qu’elle soit et l’emprise du grand banditisme sur notre société. Je crois à l’avenir du mouvement nationaliste mais un mouvement citoyen et respectueux des règles démocratiques.
J’avoue avoir eu peur
Je dois cependant avouer avoir éprouvé une peur réelle en découvrant l’article du Ribombu. Certainement pas en lisant le texte du rédacteur anonyme ou en découvrant la conférence de presse du FLNC ! Non j’ai eu affreusement peur en découvrant dénichée sur Google images la photo épouvantable qui illustre l’article. Ce serait donc moi ce poussah au double menton, aux yeux rétrécis par l’âge. La vieillesse est vraiment un naufrage ! Le jour même, je me suis jeté dans la mer (12° s’il vous plaît) pour nager, nager encore afin de perdre quelques grammes. Il faut absolument que je maigrisse. Au moins de vingt kilos… J’ai hésité entre une grève de la faim pour un quelconque motif (j’ai pensé au droit des cons à s’exprimer ce qui représente un combat de masse) et à un sain retour au sport. Mieux que le régime Dukan pour maigrir le Ribombu. Allez va ! Je veux bien passer sur le contenu du petit article infâme. Mais cette photo atroce qui blesse au plus profond mon narcissisme c’est vraiment mais alors vraiment dégueulasse ! Car hélas c’est moi !
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