En écho à l’annonce de la fin de la lutte armée, ils étaient des dizaines de milliers à manifester samedi (dernier). Comme une vague d’espoir, des dizaines de milliers de Basques ont parcouru hier les rues de Bilbao, à l’appel des signataires de l’accord de Guernica. Ratifié le 25 octobre 2010 par l’ensemble des partis et des syndicats de la gauche indépendantiste, ce pacte incitait ETA à bannir la violence et invitait au dialogue les gouvernements français et espagnol autour du rapprochement des prisonniers basques et du droit à l’autodétermination. Trois jours après l’annonce de l’arrêt définitif et sans condition de la lutte armée, cet accord prend une autre dimension.
« Une nouvelle chance »
« Aujourd’hui, c’est comme si ETA nous avait enfin entendus, comme si une nouvelle chance s’offrait au Pays basque. » Libe et Joseba sont venus spontanément. « Nous n’avons pas vraiment l’habitude de manifester, mais aujourd’hui, c’est différent. Il faut un point pour commencer une nouvelle phrase, nous pensons que le moment du changement est arrivé. » Asier et Lohitzun, eux, sont des fidèles de ce genre de rendez-vous. « Cela fait très longtemps que nous n’avions pas été si nombreux. » Pour le jeune couple venu de la petite ville d’Azpeitia, en Guipuzcoa, l’heure de la réconciliation a sonné : « Les chefs d’État doivent écouter l’appel lancé lors de la conférence pour la paix à Saint-Sébastien. Il faut qu’ils se manifestent pour regagner la confiance de la société basque. »
La question des prisonniers
« Cela passe en priorité par le rapprochement de nos prisonniers », soulève Nerea. Son cousin est un des 140 etarras emprisonnés en France. « Ses parents font le trajet en bus de Saint-Sébastien jusqu’à Lyon une fois par mois. Moi, je n’y vais que très rarement, cela représente un très long trajet pour le voir quelques minutes au parloir. C’est triste, mais c’est ainsi. »
Dans les cellules espagnoles, le nombre de prisonniers d’ETA s’élève à 559 personnes, dispersées à travers la péninsule. Une quarantaine d’entre elles ont déjà bénéficié d’un programme de rapprochement mis en place par le ministère de l’Intérieur, destiné aux repentis qui se désengagent publiquement de l’organisation armée.
« Sans amnistie, la paix n’est pas possible », scande Iñigo, dans la foule. « Je suis vraiment heureux qu’ETA ait renoncé à la violence, mais nous ne pouvons pas attendre le retour de nos proches en restant les bras croisés. »
Comme souvent, Mertxe Colina, membre d’Abertzaleen Batasuna (parti nationaliste de gauche), a traversé la Bidassoa pour venir manifester aux côtés des représentants politiques du Pays basque espagnol. « L’exemple irlandais nous montre le chemin. Un an après le début de la trêve en Irlande du Nord, tous les prisonniers de l’IRA avaient été libérés. Le désarmement de l’organisation s’est fait peu de temps après. C’est la preuve qu’une nouvelle politique pénitentiaire pourrait changer beaucoup de choses. »
Législatives en novembre
« La question des prisonniers et du droit à l’autodétermination du peuple basque est pour nous l’enjeu majeur des élections législatives du 20 novembre prochain », commente Borja. Ce sympathisant abertzale explique : « Si la droite espagnole du Parti populaire accède au pouvoir, la marge de manœuvre des partis indépendantistes basques sera beaucoup plus étroite. C’est aujourd’hui qu’il faut prendre les décisions et arrêter de tergiverser. Dans un mois, il sera peut-être trop tard pour négocier autour de la question basque. »
Source de l’article du journal SUD OUEST
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