L’antique système corse a vécu : le XXème siècle aura eu raison d’une organisation sociale vieille d’au moins 2000 ans. Que reste-t-il de cette «société en mosaïque» comme l’a qualifiée Gérard Lenclud ?
Des deux îles voisines dont Marcel Bloch a pu dire « qu’elles étaient celles dont le développement mérite le mieux d’être qualifié d’autochtone », l’une est entrée définitivement dans la modernité et les Sardes ne quittent plus leur pays. La Corse pour sa part, est soutenue par la France, comme la corde soutient le pendu. La Corse d’aujourd’hui est un archipel de 360 îlots qui n’en finissent pas de mourir !
Deux faits majeurs ont marqué la Corse du XXème siècle:entre 1920 et 1960, l’immigration italo-sarde a évité au pays une crise démographique sans précédent. De cet apport extérieur si proche, on peut dire sans risque de se tromper qu ‘il a contribué à sauver ce que l’on fini par appeler légitimement le Peuple Corse et à favoriser une prise de conscience que l’on peut considérer aujourd’hui comme constitutive de notre identité présente et à venir. Dans le même temps se dessinait un pays qui perdait sa structure agropastorale et son économie essentiellement « domestique » ; il évoluait, mal, partiellement et sans stratégie d’État, vers une économie de cueillette et d’expédients, de fonctions administratives et de services.
Le paysage rural a disparu inexorablement et désormais les Corses habitent majoritairement dans les villes. Il s’agit bien d’une révolution historique, qui a modifié pour longtemps l’équilibre économique, social et politique de la Corse d’aujourd’hui . La conséquence la plus tragique a été l’impact sur la vie quotidienne des Corses de l’évolution du prix du foncier qui a achevé de semer encore plus de désordre dans un tissu affaibli et faiblement productif,caractéristique d’une société mal préparée au monde contemporain !
Que faire dés lors : accepter le statut peu enviable de région européenne sous développée, station balnéaire au rabais, préfecture sans âme et sans avenir, vouée à l’administration d’un petit bout de France et à la domination des bandes?Ou bien au contraire, développer ce pays assez riche de potentialités pour faire vivre ses 300000 habitants, assurer leur indépendance économique et en remodeler le paysage politique, tant il est vrai qu’une vraie réforme ne saurait se limiter à la suppression d’institutions moyenâgeuses . Le fantasme du retour de la « diaspora » s’est désormais évanoui dans la phraséologie réductrice du XXème siècle, il nous faut définir l’identité fondatrice de la Nation et en fixer les règles sociales.
Pour la première nous ferons ce qu’on fait toutes les nations jeunes, d’autant plus facilement que le matériau ne nous fait pas défaut.Reste donc à définir le contrat social corse de demain ! Répéter à l’envi que le Peuple Corse doit constituer une communauté de destin relève d’une obscure tautologie qu’il nous faudra clarifier. A l’évidence les Corses n’ont cessé de combattre l’arrivée massive d’une population jetée là, non par besoin économique, mais bien pour tenter de résoudre un problème politique en se livrant-comme le firent jadis les Soviétiques ou les Allemands avant eux- à une véritable substitution ethnique. Ils ne refuseront pas en revanche l’apport de compétences et de forces de travail et de création qui enrichiraient le pays.
Pour dire les choses simplement, la Corse moderne a plus besoin d’artisans, d’ouvriers, d’ingénieurs et d’entrepreneurs que de fonctionnaires,de vendeurs, de gendarmes ou de propriétaires de villégiatures de passage.La gageure qu’il nous échoit de tenir est là toute entière.Nous sommes les seuls à pouvoir y répondre, si nous voulons bien comprendre l’impérieuse nécessité de prendre nos distances avec un système vermoulu et renouer avec nos voisins qui ont fait la richesse de la Méditerranée Occidentale et qui sont d’ores et déjà revenus à leur niveau historique, comme la Catalogne et l’Italie.
Ghjacumu Petru
Corsica Infurmazione: l’information de la Corse, des Réseaux sociaux et des Blogs politiques [Plateforme Unità Naziunale]
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