Les imprimeurs insulaires, par la voix du Syndicat professionnel des maîtres imprimeurs de Corse, vous ont alerté au sujet de leurs difficultés qui ne sont pas que des soucis catégoriels puisqu’elles peuvent rejaillir sur le débat démocratique en Corse. Je veux parler du scrutin pour l’élection territoriale.
Les contraintes de l’insularité, une fois de plus, ne collent pas avec les lois de la République et provoquent une situation unique en France qui réclament un traitement spécifique.
Le premier tour de scrutin se présente généralement sans difficulté.
Les listes sont rendues officielles avec suffisamment de temps pour que le dépôt règlementaire des imprimés se fassent avec soin et sans appréhension particulière.
Le second tour, en revanche, est une grande source d’anxiété. Il s’agit pour chaque liste de réaliser 475 391 bulletins de vote et 226 891 professions de foi (soit 702 282 documents au format A4 pour l’élection de 2010) en une seule nuit.
En effet, passé le vote du 1er tour le dimanche, les listes se recomposent le lundi et ne deviennent officielles que le mardi à 18h, heure limite du
dépôt des listes.
En réalité, c’est vers 21h compte tenu du temps de validation par les services de la préfecture du bon à tiré, que le travail d’impression peut démarrer.
En quoi la situation est-elle particulière en Corse ?
– il n’y a pas de dépôt de papier dans l’île et les livraisons se font dans la semaine (contre 24h sur le continent). Ce qui oblige à des risques périlleux pour l’entreprise compte tenu de la quantité considérable de papier à faire rentrer (à peu près 8 palettes par liste), avant les résultats de premier tour, sans avoir l’assurance d’être sollicité par un candidat au second.
– Nous sommes face à des petites entreprises qui n’ont pas la possibilité de constituer des équipes de travail en 3/8, règle en la matière (8h en
matinée, 8h en soirée, 8h durant la nuit).
On procède donc par heures supplémentaires. Or l’augmentation du coût de la fabrication des imprimés du second tour fixée à 10% par l’État est
beaucoup trop faible. D’autant que s’ajoute la journée du lendemain chômée entièrement, puisque les salariés ont travaillé la nuit.
Les commissions paritaires qui auparavant se tenaient régulièrement pour en débattre ont été supprimées par le gouvernement. Donc impossible de négocier.
– Aucune imprimerie de labeur en Corse ne possède de presse rotative qui est la presse idoine pour ce type de travaux (gros débit, massicot en sortie qui allège le travail de coupe).
Pour répondre à la demande dans le temps imparti, l’imprimeur corse mobilise toutes ses machines, soumises à des cadences infernales. La défaillance de l’une d’elles est possible et il n’existe aucun professionnel indépendant en maintenance de matériel in situ capable d’intervenir lors de cette fameuse nuit.
– Enfin passé tous ces obstacles, reste à livrer les documents… le mercredi, à midi tapant sous peine de rejet de la liste.
Compte tenu de la responsabilité et des conséquences, cette tâche échoit donc à l’imprimeur, d’autant que l’État en multipliant, selon ses convenances, les points de livraison dans ses préfectures et sous-préfectures a réduit de plusieurs heures la fameuse nuit de
fabrication.
Pour assurer dans le délai imparti le port des documents, l’imprimeur doit louer des camions répondant aux exigences de l’État (munis de hayons élévateurs pour le déchargement). Tout ceci, après des heures de travail de nuit, avec une météo incertaine et l’angoisse des délais à tenir.
Monsieur le président, les imprimeurs ne réclament pas de subvention, mais de la compréhension. Ils vous interpellent sur les conséquences d’une situation qui est aujourd’hui limite.
Aussi, ils proposent que le second tour de scrutin de l’Assemblée de Corse soit porté à deux semaines après le premier tour. Aucun empêchement constitutionnel ne peut être opposé à cette mesure particulière puisqu’il existe déjà un tel délai pour le scrutin de l’élection du président de la République.
Imprimer hors de l’île ne peut être une solution pour l’économie de la Corse, en ces temps de crise et de menaces sur l’emploi. D’autant que le problème de livraison ne serait pas réglé et même compliqué davantage par les aléas des liaisons maritimes ou aériennes. Sans parler du coût.
Il existe une quinzaine d’imprimeurs dans l’île mais seule 2 à 3 imprimeries sont en mesure d’assurer dans les conditions actuelles les travaux de second tour.
Or, chacun d’entre eux ne peut accepter l’impression que d’une voire deux listes au maximum.
Ainsi, certaines listes pourraient se retrouver sans imprimeur au second tour.
Demander un prolongement d’une semaine pour l’entre-deux tours n’est donc pas aberrant d’un point de vue démocratique. Bien au contraire.
Faute de temps suffisant, les négociations entre listes se font la plupart du temps par téléphone et au plus offrant on le constate régulièrement.
Ce n’est pas démocratique et c’est trompeur pour l’électeur.
Un allongement du délai de l’entre-deux tours donnerait plus de recul aux représentants des listes retenues, et de place au débat d’idées.
L’imprimeur de son côté aurait le temps de faire rentrer le papier et d’opérer dans des délais corrects.
Donc voilà ma question : êtes-vous prêt à soutenir cette revendication, à l’Assemblée nationale et/ou lors des discussions avec le gouvernement dans le cadre du débat sur la réforme institutionnelle ?
Je vous remercie.
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