Les indépendantistes corses s’ouvrent pour la première fois aux partis traditionnels de tous bords lors des Journées internationales de Corte (Haute-Corse) qui se tiennent samedi et dimanche dans l’île. Une dizaine d’élus de droite et de gauche participeront ainsi à un débat sur l’évolution institutionnelle de l’île dimanche, près de trois mois après l’élection de François Hollande à la présidence de la République.
Le président de la commission de la Collectivité territoriale de Corse en charge de l’évolution institutionnelle, Pierre Chaubon, et le nouveau député UMP de Corse-du-Sud, Laurent Marcangeli, seront notamment présents.
“Nous cherchons à ouvrer à un compromis historique”, a déclaré Jean-Guy Talamoni, l’un des dirigeants de la mouvance Corsica Libera, qui organise cette 31e grand-messe nationaliste.
“Les nationalistes ne changeront pas les choses seuls et encore moins contre les autres forces politiques de l’île”, a-t-il ajouté dans Corse Matin.
Les revendications des nationalistes, qui ont obtenu 36?% des voix aux élections territoriales de 2010, sont désormais au cour du débat politique insulaire.
Elles portent notamment sur la reconnaissance du peuple corse et de sa langue, la maîtrise du foncier pour lutter contre la spéculation immobilière et le transfert de la fiscalité.
La collectivité territoriale de Corse a récemment validé en commission la notion de peuple corse, censurée en 1991 par le conseil constitutionnel lors de l’élaboration du statut Joxe.
Jean-Guy Talamoni estime qu’après l’échec des accords de Matignon impulsés par Lionel Jospin (PS) au début des années 2000 et du référendum initié en 2003 par Jean-Pierre Raffarin (UMP) pour une collectivité unique, la Corse est “à la croisée des chemins”.
NOUVELLES TENSIONS ENTRE NATIONALISTES
Lors de sa campagne présidentielle, François Hollande avait indiqué qu’il n’y aurait “aucune évolution institutionnelle” s’il accédait à l’Elysée.
Mais les nationalistes corses rappellent que les grandes réformes sur l’évolution institutionnelle de l’île ont été obtenues dans les années 1980 et 1990 quand la gauche était au pouvoir.
Tout en affichant une volonté d’ouverture à l’extérieur, le mouvement nationaliste est confronté depuis plusieurs mois à des tensions entre les proches de Jean-Guy Talamoni, les anciens de la Cuncolta, et ceux de Paul-Félix Benedetti, chef de file du courant progressiste U Rinnovu (Le Renouveau).
Ces derniers reprochent aux amis de Jean-Guy Talamoni d’avoir un fonctionnement hégémonique et d’avoir écarté des instances décisionnelles de Corsica Libera la plupart des responsables de U Rinnovu.
Paul-Félix Benedetti a néanmoins assuré qu’il serait présent aux journées de Corte pour “le débat institutionnel” et qu’il n’envisageait pas de rupture.
“Je suis l’un des fondateurs de Corsica Libera, j’y suis toujours et je n’ai aucune raison fondamentale de partir. Je représente une tendance, et je crois que dans mon parti, la pluralité et la diversité peuvent s’exprimer“, a-t-il dit à Reuters.
“Au moment où les nationalistes s’ouvrent à la classe politique insulaire, il serait paradoxal qu’ils se ferment à leur propre groupe, mais bien sûr, je ne crois pas au mariage sans consentement mutuel”, a-t-il ajouté.
Le malaise a cependant a trouvé un écho au sein des organisations clandestines.
Un nouveau FLNC (Front de libération nationale de la Corse), proche de la tendance dite du 22 Octobre, soutenant U Rinnovu, a annoncé sa création début juillet, se distinguant ainsi du FLNC regroupant le canal historique.
Ce nouvel épisode dans l’histoire agitée du nationalisme corse trouve notamment son origine dans la revendication de l’assassinat de Christian Leoni, accusé par les clandestins d’avoir abattu en juin 2011 l’un de leurs cadres, Charles-Philippe Paoli, proche de Charles Pieri, figure tutélaire du FLNC.
“Les proches du 22 Octobre ne voulaient pas que cela soit revendiqué et demandaient une plus grande lisibilité des attentats”, explique un militant sous couvert de l’anonymat.
Ces tensions interviennent alors que la plaine orientale de la Corse connaît un regain de violences avec six homicides en dix-huit mois, dont plusieurs visant des nationalistes.
Depuis janvier, l’île a connu également une recrudescence des attentats à l’explosif notamment après l’élection présidentielle où une vingtaine de résidences ont été visées.
Dans un communiqué revendiquant ces actions, le FLNC tendait la main à François Hollande en évoquant une “solution politique”.
Roger Nicoli Edité par Gérard Bon AFP
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