« Nous voulons croire que nous n’aurons plus jamais à diffuser un communiqué d’une telle teneur ». Probable que cette phrase a dû avoir une résonnance toute particulière aux oreilles des plus convaincus des modérés du nationalisme corse.
Dans une fin d’année asphyxiante et anxiogène, entre un hiver morose rythmé par la crise et une chronique des faits-divers particulièrement lourde et sanglante, le communiqué de revendication transmis lundi à Corsica résonne comme un avertissement. Pour les familles du nationalisme corse, il est aussi un défi.
Bad vibrations. Evidemment, sur le plan politique, le choix de la revendication publique n’est pas neutre. La motivation des auteurs de ce texte est à double entrée. A la fois à destination des ennemis ciblés – « le groupe mafieux » -, avec lequel les clandestins durcissent désormais le bras de fer. Armes à la main. Ici, il s’agit de marteler et confirmer le message proclamé en juillet : pas question de se laisser faire.
Plus largement, l’opinion, à qui on souhaite donner des éléments de lecture sur cette action – pour ne pas dire la faire partager -, est prise à témoin. En pariant sur son indulgence pour pardonner la faute (l’assassinat comme mode d’action assumé), vue les circonstances invoquées. Ce qui reste à vérifier. Pas sûr que les rédacteurs de ce texte mesurent, pour paraphraser leur formulation, ce que ce message porte en lui de vibrations glaçantes, donc peu susceptibles de provoquer une quelconque sympathie.
Bicéphale. Résultat, on se retrouve aujourd’hui avec un courant modéré dont la plus-value capitalisée dans les urnes repose principalement sur une pacification de la revendication nationaliste, qui doit clairement s’inscrire dans le jeu démocratique, et avec une clandestinité aux abois, qui estime qu’elle doit faire la preuve de son existence. Jusqu’à revendiquer une exécution, ce qu’elle n’a fait formellement que cinq fois dans sa longue histoire tourmentée.
Si, sur le plan de la violence, cette revendication tonitruante n’augure rien de bon – elle pourrait ouvrir un nouveau cycle de représailles sur la base de l’éternelle loi du talion et de sa variante insulaire de la vendetta -, sur le plan politique, cette décision est un sérieux écueil pour les enfants d’Aléria.
Clivage. « Dans une situation délétère, de déchainement de la violence, nous rejetons catégoriquement toute les formes de violence, a rappelé Jean-Christophe Angelini lundi soir sur France 3 Corse, mais ce n’est pas pour autant que nous nous abriterons dans des positions de principe ». Une intervention un poil contradictoire, faite au nom du PNC, qui prouve que chacun marche désormais sur des oeufs. Ce choix ne facilitera pas la tâche de ceux qui travaillent depuis des mois pour trouver les conditions d’un rapprochement entre cousins du nationalisme corse, entre radicaux et modérés, pour espérer demain conquérir le pouvoir.
Ceux-là aussi, en réalité, risquent d’être à ranger au rang des victimes (symboliques, celles-là) d’un communiqué écrit en lettres de sang.
01/12/2011 24 Ore n°329
Par Olivier-Jourdan Roulot
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